Journal d’une bedworkeuse

Journal d’une bedworkeuse – épisode 3

Dimanche 15 mars

Le soleil pointe son nez dans l’après-midi. Mon compagnon et moi décidons de faire une balade au bord de la mer. Sa maison est située à environ 100 mètres de la digue à vol d’oiseau. Depuis la pièce où je travaille, ou plutôt depuis le lit où je travaille (ah oui, je ne vous ai pas encore dit que lorsque je travaille au domicile, je travaille au lit), je vois le poste de secours et je peux dire au flottement de son drapeau si le vent souffle et dans quelle direction. Comme je me lève souvent très tôt, j’assiste régulièrement au lever du soleil, du moins en cette période. Il arrive à droite de ma fenêtre, légèrement à l’oblique.

Lit-bureau

Ce dimanche, veille de l’annonce présidentielle, tout le monde semble avoir eu la même idée que nous. L’affluence sur la promenade est digne d’un mois de juillet. J’apprends plus tard que Michel Cymès, le médecin très médiatique, a poussé un « coup de gueule » face aux images des Parisiens étalés sur le gazon du parc des Buttes-Chaumont ou d’ailleurs. C’est peut-être la première fois que je me sens vaguement coupable.

Le matin, j’ai téléphoné à mon père comme chaque dimanche. Il m’a demandé ce que je comptais faire eu égard au repas de famille auquel je l’ai invité, en compagnie de mon frère et de ma belle-sœur, le dimanche suivant. Ma belle-sœur étant aide-soignante dans un Service infirmier d’aide à domicile, mon père a ajouté : « Elle travaille beaucoup avec des petits vieux ». J’ai souri. Il a 84 ans bientôt.

Je n’avais pas même songé à annuler ce déjeuner avant qu’il ne m’interpelât. « Je verrai », je lui réponds.

Je contacte aussi mon locataire. Depuis l’été dernier, je mets à disposition mon appartement meublé. Pour les impôts, louer son logement est considéré comme une véritable activité. Pour avoir tout d’abord inscrit mon F3 sur la plateforme Airbnb, je sais ce que cela suppose de travail : accueil des touristes, lavage des draps et des serviettes, ménage, repassage… et ça revient vite ! Alors, quand j’ai appris que le cousin d’un de mes proches cherchait un logement, je lui ai proposé un bail qui prendra effet au 1er avril. Toutefois, tout devra se faire à distance : signature du contrat de bail, inventaire des équipements, état des lieux, démarches auprès des fournisseurs d’eau et d’énergie, information aux collectivités concernées… Le télétravail présente un bénéfice secondaire : la confiance réciproque.

Corinne Le Bars, écrivain public et biographe

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