Nous publions quelques extraits du prochain livre de la coopérative, à paraitre en septembre prochain, en vente dès à présent en souscription. Merci de votre soutien !
Discussion professionnelle – Comment faire avec l’altérité sociale et culturelle ?
Alain : Un cas classique : les gens qui fument beaucoup alors qu’ils ont de gros problèmes financiers. Comment réagit-on ? Pour moi, la première réaction doit être de reconnaitre la situation telle qu’elle est, dans sa dimension très personnelle. J’ai connu des travailleurs sociaux, surtout des jeunes pleins d’enthousiasme, qui pouvaient dire : « Mais ce n’est pas possible, il faut arrêter de fumer ! Je vais vous aider sur votre budget ». Certaines personnes ont un tel besoin de cigarette qu’elles ne peuvent pas entendre ce discours. Alors deuxième réaction pour faire évoluer la situation : la suggestion. L’acte éducatif, c’est de suggérer : « Peut-être que vous pourriez réfléchir à l’incidence de votre cigarette sur vos enfants ? Sur votre budget ? » On sème la graine.
Marie-Agnès : Je suis d’accord, c’est moins intrusif.
Alain : Par contre, ne rien dire n’est pas professionnel. Plutôt qu’esquiver le sujet, l’aborder de façon tranquille et par étapes est plus aidant. C’est une suggestion, pas une obligation. Le rapport à l’hygiène me parait plus délicat. C’est parfois compliqué. Dans certaines visites, je me souviens avoir vu une moitié de la pièce avec des couches sales, des affaires qui trainaient, des crottes de chat, et l’autre moitié un peu nettoyée, parce qu’ils savaient que je venais. Qu’est-ce que je fais ? Les gamins en couches ou en pyjama au milieu de la journée… Une fois ça va, deux fois ça va…
Françoise : Il y a quand même des choses qui nous échappent… Peut-être que je vais vous choquer ! Je me dis que nous n’avons pas forcément les mêmes réactions, les mêmes seuils de tolérance en fonction de ce qui se passe dans la rencontre avec la famille. Il se peut qu’on accepte plus ou moins bien une situation similaire d’une famille à l’autre, parce qu’il n’y a pas la même rencontre, il n’y a pas le même affect avec les personnes. Il y a parfois de l’agacement, ou au contraire des familles qui nous touchent, qui suscitent davantage de compassion, et alors d’indulgence. Ce que je veux dire, c’est qu’il y a une part d’humain dans notre réaction à ce qui nous dérange.
Marie-Agnès : Il y a quand même des choses qu’on prend en compte au plan culturel, par exemple pour les familles de gens du voyage sédentarisées. Ce sont des modes de vie qui ne sont pas comme ceux d’autres familles, mais on sait que c’est comme ça depuis longtemps… Effectivement, il y a des situations qui dépassent l’entendement, en particulier pour les enfants. Il faut aussi être attentif à la réaction des enfants eux-mêmes, qui supportent plus ou moins la situation, par exemple d’insalubrité.
Françoise : Là est toute la question : qu’est-ce que l’on fait dans ces situations ? Est-ce qu’on y va, au risque de bousculer tout un équilibre ? Notre intervention peut se révéler très intrusive. J’ai connu des enfants qui ont été séparés de leurs parents très jeunes et qui pourtant ont pris modèle sur eux pour ces questions de comportement, alors qu’ils ne se voyaient pas ou très peu. Cette forme de loyauté à la famille nous dépasse, c’est vraiment impressionnant.
Une souscription de lancement
La parution de ce livre est envisagée pour septembre 2022. Pour en assurer la fabrication, la correction, la mise en page et les illustrations, nous lançons dès à présent une souscription. Nous voudrions atteindre l’objectif de 250 exemplaires en prévente, au tarif de 14 €.